Le 3 novembre, le Saint Siège a annoncé la participation du Pape François dans la COP 28, qui se tiendra à Dubaï du 30 novembre au 12 décembre. Un pape dans une COP, c’est du jamais vu ! Quels sont les enjeux de cette présence ? Quelle contribution pour un souverain Pontife dans la lutte contre le réchauffement climatique ?
Cette conférence annuelle sur le climat aux Emirats Arabes Unis à Dubaï se tiendra dans un contexte marqué par beaucoup de doutes sur la capacité de la présidence à porter un accord ambitieux. Cette édition de 2023 consistera à sauver en premier lieu l’accord de la conférence de Paris et d’en faire le bilan, car selon le récent rapport des nations Unis sur le changement climatique Global Stocktake 2023 (GST), le monde n’est pas sur la bonne voie. Les Etats doivent donc se fixer la limitation du réchauffement à 1,5°. Il est prévu également la mise en œuvre d’une architecture financière, indispensable pour une transition énergétique juste et ordonnée. Il faut en outre concrétiser les acquis de la COP27, notamment sur les pertes et les dommages subis par les pays en développement.
Un invité surprise de la COP28
Depuis 1995, les états du monde entier se rassemblent chaque année dans les conférences pour parler du climat et de la lutte contre le réchauffement climatique. Mais dans les coulisses se rangent pas mal d’enjeux économiques et politiques qui freinent les divers engagements en faveur de la protection de l’environnement. Avant 2015, la présence du Vatican dans cette lutte contre le réchauffement climatique était presque implicite, mais depuis la publication de l’Encyclique Ladato Si, la voix du pape François commence à retentir d’une façon remarquable à travers cette encyclique sortie la veille de l’ouverture de la COP21 à Paris. Avec cette COP28, il semble que le pape est très engagé plus qu’avant dans le but de faire bouger les lignes, car dire qu’il n’y a rien à espérer de la Cop28, écrit-il dans la Laudato Deum, serait un acte suicidaire qui conduirait à exposer toute l’humanité, en particulier les plus pauvres, aux pires impacts du changement climatique. La présence du souverain Pontife dans la COP28 serait un acte inouï et pragmatique, ce qui ne signifie pas que dans d’autres COP le Vatican était absent. Sa présence devant les dirigeants du monde entier fera sans doute la différence et touchera sur la décadence éthique, souvent déguisée par le marketing et les fausses informations qui illusionnent les personnes, sans tenir compte de leur avenir dans la gestion de la crise climatique.
Laudato deum, pour un renforcement de l’action pour le climat
Huit ans après la sortie de l’encyclique Laudato Si qui était considéré par certains comme une bombe théologique en matière de climat, le Pape François vient de publier une exhortation apostolique Laudate Deum un complément de Laudato si. Comme le Pape l’a récemment révélé à la télévision italienne, Laudato Si a été écrit sous l’inspiration de la ministre française de l’environnement, Ségolène Royal qui avait été envoyé par le président Hollande pour accueillir le Pape alors qu’il venait à Strasbourg au Parlement européen. Et à la ministre de lui demander : « Mais est-ce que vous préparez quelque chose sur l’environnement ? Faites-le avant la réunion de Paris »
Regrettant que la volonté d’engagement contre le réchauffement climatique soit fortement émoussée, le Pape vient de sortir à la veille de la COP28 une Exhortation Apostolique Laudate Deum (Louez Dieu) aux chrétiens et à toute personne de bonne volonté. C’est un texte politique qui interpelle d’adopter une vision plus large qui nous permet non seulement d’admirer les merveilles du progrès, mais aussi de prêter attention à d’autres effets que nous n’aurions pas imaginé il y a plus d’un siècle. C’est pourquoi, il insiste dans Laudato Deum de repenser notre usage du pouvoir de façon à ce que l’immense progrès technologique soit accompagné d’un développement de l’être humain en responsabilité, en valeurs, en conscience. Ce texte bat en brèche les précédentes COP et la faiblesse de la politique internationale marquée par une diplomatie multilatérale vieille qu’il faut reconfigurer et recréer à la lumière de la nouvelle situation mondiale (LD n°37).
Par ailleurs, c’est décevant, déplore le Pape dans Laudato deum, de voir que les promesses passées dans les COP précédentes n’ont pas été tenues. Le président de la COP28 Sultan Al Jaber, l’actuel ministre de l’Industrie et des Technologie avancées des Emirats arabes Unis, après son audience avec le pape François, a annoncé à Vatican news le 11 octobre 2023 que la COP28 veut changer la donne en traduisant les promesses en projets et il veillera à ce que cette COP28 soit la plus inclusive jamais organisée.
Bref, espérons que l’appel pressant du Pape François en faveur d’un renforcement de l’action pour le climat, fera de ce grand rendez-vous mondial, une plateforme inclusive de collaboration avant qu’il ne soit trop tard pour contenir les conséquences de la crise climatique.