A Mwumba, commune Mutaho de la province de Gitega, le parcours impressionnant de petits groupements d’épargne et de crédit qui ont constitué un réseau, qui s’est transformé en coopérative, devenue depuis la coopérative « Twaranyuzwe Turwanye inzara », renseigne sur les notions de développement, d’empowerment des femmes et du leadership…un exemple à suivre.
Mais avant d’aller plus loin, vous vous demandez bien ce qui m’emmène dans ce coin dont je ne connaissais l’existence avant d’y arriver. En effet, une amie m’avait juré par tous les dieux que les personnes vivant dans ce lieu étaient un cas d’étude en matière de développement. Étant très curieux et surtout très fan de Saint Thomas (pas la boulangerie ! Je parle du disciple de Jésus qui n’acceptait que ce qu’il avait vu.), j’ai décidé d’y aller et voir de mes propres yeux.
C’est un mardi après-midi. Je quitte Gitega, direction Mwumba. Après une bonne quarantaine de kilomètres à rouler, me voici arrivé au tournant qui me mène vers ma destination. Premier choc ! À part les bananeraies verdoyantes qui poussent, à se poser des questions de par la sècheresse que connait notre pays depuis quelques mois, rien du reste ne laisse présager ce que j’allais découvrir.
Quand la vision dicte les actions
Arrivé sur cette colline, je discute avec les habitants pour en savoir plus sur les progrès et développement dont j’avais entendu parler. On me conseille de rencontrer une certaine Fidès Manirambona. Et c’est avec grande fierté qu’elle me raconta le parcours exemplaire de leurs petits groupements ou AVEC (Associations Villageoises d’Epargne et de Crédit) devenus par la suite coopérative. Leur ambition: apporter un changement radical dans toute la communauté.
« Au début, on n’était qu’une simple association de femmes où on cotisait pour finir par repartager l’argent entre membres. Avec le temps et les formations qu’on a reçues de la part de certaines ONG et surtout de CARE Burundi, plusieurs associations qui œuvraient sur cette colline ont fusionné et on a commencé à cotiser pour investir. Nous avons reçu des renforcements de capacité sur la lutte contre les violences basées sur le genre, le changement de comportement, l’épargne et le crédit pour nommer que cela. Petit à petit, nous avons passé d’AVEC à une coopérative, avec un NIF. Avec le temps, on a ouvert un compte dans une microfinance, ce qui nous a fort aidés dans la suite. »
En effet, après avoir été primée d’un moulin électrique lors d’une compétition organisée par CARE, la coopérative « Twaranyuzwe Turwanye inzara » a pu acheter tout le matériel nécessaire pour avoir un raccordement au courant électrique. Une grande partie des 2.5 millions qu’a coutés ce raccordement est issue des fonds propres de la coopérative.
Un exemple de leadership à suivre…
Parmi les 250 membres de la coopérative, plus de 200 sont des femmes. En plus de l’investissement, l’épargne, les activités génératrices de revenus, etc. Cette coopérative œuvre aussi dans la sensibilisation pour l’espacement des naissances et la lutte contre les violences basées sur le genre.
N. Dévote, membre de la coopérative, affirme qu’il n’y a pas eu de cas de violences conjugales depuis 2018 alors qu’avant, même les hommes étaient battus par leurs épouses.
En plus du développement global, un système de développement familial a été implémenté par ces braves gens. En effet, aux membres qui le souhaitent et suivant leur capacité, du bétail leur est donné pour élevage. Ainsi plus de 50 porcs, plus de 50 chèvres, et plus de 30 poules ont été déjà distribués. Pour les plus démunis, des cartes d’assurance maladie leur sont offertes et pour certaines personnes âgées des maisons ont été construites avec le concours des autorités communales.
En parlant de l’administration, Nihorimbere Melchiade, administrateur de la commune Mutaho ne tarit pas d’éloges quand il s’agit de parler des habitants de la colline Mwumba et de leurs réalisations. Travaux communautaires, œuvres caritatives, développement communal, ils interviennent sur tous les plans. Leur implication pour le développement intégral inspire même l’administration qui est en train d’implémenter le même modèle sur les autres collines.
J’étais si impressionné par cette communauté que je ne pouvais pas m’empêcher de leur demander ce qu’ils aimeraient avoir comme soutien pour qu’ils continuent sur leur lancée. Et la réponse fut encore plus surprenante : «On pourrait demander un soutien financier, mais l’argent vient et part, par contre on aimerait bénéficier de plus de formations dans différents domaines, car la connaissance reste et peut générer encore plus d’argent et pendant plus longtemps.»
En cours de route vers Bujumbura, je réfléchissais sur ma vie et ma façon de courir derrière l’argent. Je me demandais ce que je ne faisais pas correctement pour avoir une vision aussi claire de ce que je veux réaliser comme ces héros de cette belle colline qu’est en train de devenir Mwumba.