Le test de niveau des enseignants vient d’être suspendu, sans doute à cause du mécontentement qu’il avait suscité chez les concernés. Et si le problème se situait au niveau du recrutement ? L’Olucome, fustige un recrutement gangrené par la corruption, le clientélisme et le favoritisme. La coalition Bafashebige, quant à elle, s’interroge toujours sur le niveau des enseignants.
Dans la salle du 2ème étage de l’ex building du ministère des Finances, les cameras des journalistes sont fixées sur Sylvestre Ntibantunganya, le président du Comité national de dialogue social. Il est 15 h 10. Cependant, après 20 minutes, les journalistes se lassent d’attendre. Le communiqué devrait être annoncé à 15h. Qui sont les personnes en retard qui devraient être présentes à la conférence de presse ?, s’interrogent-ils.
En attendant, comme d’habitude, dans leurs conversations, certains journalistes anticipent le contenu de la déclaration. Certains disent : « Le comité de dialogue veut recadrer la Cosesona (Coalition des Syndicats des Enseignants pour la Solidarité Nationale) ». D’autres s’interrogent : « Est-ce que le président du comité de dialogue osera donner raison à la Cosesona ?»
Un petit détail : les représentants des enseignants déjà présents sur les lieux semblent sereins. Ils portent tous des chemises en pagne à l’effigie de la coalition Cosesona.
Une issue heureuse
Pour détendre l’atmosphère, le président Ntubantunga lance une blague « En 1995, lorsque nous étions dans les négociations au Caire, le président Mobutu était arrivé en retard. Le Médiateur, Julius Nyerere lui demanda à haute voix : « Président Mobutu, do you have a watch ? », toute la salle rit.
Après quelques minutes, le secrétaire permanent du ministre de l’Education arrive. Surprise : le président Ntibantunganya déclare que le ministre de l’éducation et la Cosesona vont signer une déclaration issue du dialogue du 17 janvier 2022.
Ensuite est annoncé qu’en attendant les conclusions des négociations, le ministère de l’Education suspend l’organisation du test de niveau des enseignants. De son côté, la Cosesona accepte de sursoir le mouvement de grève.
Où est le nœud du problème ?
Les négociations sont en cours, c’est un fait. Néanmoins, l’organisation du fameux test soulève une question pertinente. Pourquoi mesurer le niveau des enseignants alors qu’on recrute les meilleurs parmi les candidats ?
Sur ce point, le président de l’Olucome Gabriel Rufyiri ne mâche pas ses mots : « Le recrutement est opaque. Du favoritisme à l’abus de pouvoir en passant par le militantisme, la corruption gangrènent le processus ».
Cet activiste déplore le fait que le recrutement du personnel enseignant se fera désormais au niveau des directions communales de l’enseignement. Normalement, c’est le ministère qui doit s’occuper de la politique de l’éducation. En ce qui concerne le recrutement, c’est un organe professionnel de l’Etat qui devrait s’en occuper.
Jeannine Kadede, une bachelière au chômage depuis plus de 5 ans, trouve que le concours de recrutement vise à éliminer certains. Normalement, tous les candidats détiennent des diplômes attestant leurs compétences. Bien plus, ces derniers effectuent des stages concluants. Pourquoi alors le concours ?, demande-t-elle. Selon elle, il faut plutôt recruter promotion par promotion.
Ce n’est pas que le recrutement qui pose problème
La coalition Bafashebige voit ça d’un autre œil. « Le concours de recrutement permet de faire la sélection parce que le nombre de postes vacants est limité alors que les candidats sont très nombreux », explique Cassien Gashirahamwe, vice-président de la coalition. Selon lui, le principal défi se trouve au niveau des compétences des enseignants : « Les enseignants ont un niveau très bas. », tient-il à souligner.
Gashirahamwe explique que les élèves qui ont de bonnes notes n’embrassent pas la filière de l’enseignement. Ils préfèrent suivre les filières qui rémunèrent mieux. « Vous comprenez que même la transparence dans le recrutement n’est pas la principale solution pour lutter contre la baisse de la qualité de l’éducation. », conclut-il
Il faut plutôt orienter dans la filière de l’enseignement les élèves ayant de bonnes notes. Mais cela ne suffit toujours pas. L’Etat doit acheter le matériel didactique suffisant, motiver les enseignants et leur assurer un recyclage régulier.