Dans son article 5, la Constitution burundaise permet le rétablissement de la monarchie, mais en passant par un référendum. Au-delà du texte, le retour à la monarchie est-il vraiment possible dans les circonstances actuelles ? Le blogueur Blaise Migabo s’est entretenu avec le professeur historien Émile Mworoha.
C’est avec l’accord de paix d’Arusha de 2000 et la Constitution de 2005 qui en ressort que l’on voit réapparaître la notion de royauté puisqu’il y est bien mentionné que «le statut et le rétablissement de la monarchie peuvent faire l’objet du référendum. Tout parti militant pacifiquement en faveur de la restauration de la monarchie a le droit de fonctionner » (Article 4 Constitution 2005). Avec le texte fondamental de 2018, l’article revient mais avec une petite nuance, la formulation a évolué de « … peuvent faire l’objet d’un référendum » à « doivent faire l’objet d’un référendum ».
Pour le professeur Émile Mworoha, « il ne faut pas se faire d’illusions, la monarchie ou le retour à la monarchie est théoriquement possible mais parait très improbable car le Burundi est tellement ancré dans la république.»
Effectivement, trop d’eau a coulé sous les ponts depuis l’abolition de la monarchie le 28 novembre 1966. Les symboles, déjà chancelants de la monarchie, ont presque tous disparu depuis lors. «La monarchie avait survécu à l’époque coloniale bien que celle-ci l’avait vidée de ses contenus comme la suppression des ‘‘hommes du secret’’ qui étaient chargés de l’organisation de l’ « Umuganuro » tout comme ceux chargés de l’entretien des tombeaux royaux, l’entrée en clandestinité du tambour ‘‘Karyenda ’’, etc.», rappelle le professeur. Mais plus tard, le travail de sape entamé pendant la colonisation a été perpétué par les républiques qui se sont succédé et a contribué à reléguer la monarchie à une réalité assez anecdotique.
Restauration de façade
Pourtant, l’Accord d’Arusha avait essayé de revaloriser le titre de Prince « Umuganwa» . « Vous verrez par exemple qu’actuellement des personnes de la famille royale mettent sur leurs cartes de visite des inscriptions comme ‘‘Prince ou Princesse tel(le)’’ ou qu’à la radio on dise ‘‘Prince ou Princesse tel(le)’’ en cas de décès par exemple. C’est également dans ce contexte que le Parti monarchique parlementaire, qui milite pour un retour à la monarchie, travaille en toute légalité » , explique l’historien.
Quant au fait que la princesse Rosa Paula Iribagiza, ait été présentée, en 2010 par sa famille, comme l’ « héritière de la Maison Royale » alors qu’il n’y a pas d’institution royale à proprement parler, le professeur Mworoha trouve normal que la seule enfant encore en vie de Mwambutsa IV soit valorisée par tous ceux qui se réclament de l’héritage monarchique. Et de nuancer : « Mais cela n’empêche pas qu’actuellement les membres des familles royales sont devenus des citoyens ordinaires. Leur prestige ‘‘supposé’’ est tout simplement de s’appeler Prince ou Princesse». Et de se demander « si les autres n’en rigolent pas ».
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