Le 17 mai 2018, les Burundais étaient appelés aux urnes. L’élection référendaire les attendait. Considérée par l’opposition comme antidémocratique, une partie de cette dernière avait appelé au boycott du scrutin. Au vu du déroulement du vote, quel est le message pour les opposants au pouvoir ?
Le 17 mai, les Burundais étaient invités à se prononcer pour ou contre la réforme constitutionnelle. Mais, faut-il le souligner, ce référendum était on ne peut plus clivant. L’opposition interne et externe estimaient (et estime toujours) que le projet de la nouvelle constitution vise l’enterrement des Accords d’Arusha. Toutefois, convient-il de le rappeler, cette opposition était divisée sur la stratégie à adopter face à ce rendez-vous électoral. L’opposition interne estimait qu’elle était obligée d’y participer tandis que celle externe appelait ouvertement au boycott. Sans succès.
Un taux de participation révélateur de l’échec de l’opposition ?
S’il y a une chose à noter dans cette élection référendaire, c’est bel et bien le taux de participation record : 96,24%. Un chiffre élevé pour être souligné, surtout que l’opposition, du moins celle externe, avait appelé au boycott. Et ce taux de participation semble montrer à suffisance que cet appel n’a pas été entendu. Peut-on alors parler de l’échec de l’opposition ? La question mérite d’être posée.
Eu égard à ce chiffre, d’aucun pourraient conclure que l’opposition ne parvient plus à se faire entendre. D’autres pourraient encore penser au manque de pragmatisme de l’opposition burundaise. Moi je pencherai beaucoup plus pour la dernière option.
Une absence de lucidité
En effet, dans un climat politique malsain, dans une situation d’intolérance politique poussé à outrance, était-il possible de boycotter le scrutin comme l’avait appelé de ses vœux l’opposition ? Cet appel au boycott était-il réaliste ? Je crois que non. Déjà, en guise de rappel, lors de l’élaboration du fichier électoral, cet appel au boycott avait été lancé mais sans succès, des intimidations tous azimuts avaient caractérisé cette activité.
Et sur terrain, il ne faut pas se leurrer, les rapports de force étaient en faveur du parti de l’aigle avec son lot d’intimidations et intolérance politique. Il n’était même pas rare d’entendre ici et là des cas de harcèlement des militants de l’opposition allant jusqu’à menacer ceux qui auraient voté « Oya ». Le boycott, lui, n’en parlons même pas. Le décret présidentiel appelant à la campagne électorale était sans équivoque.
Alors, dans ces conditions, dire aux gens de ne pas aller voter était-il pragmatique ? Cet appel avait-il la chance d’être suivi ? Difficile à dire, mais, le fait est que le taux de participation annoncée par la CENI révèle l’ « adhésion massive » des Burundais au référendum (même si sur ce point d’adhésion massive, il y a de quoi discuter).
Ainsi donc, affirmer que l’opposition n’a pas été réaliste ne serait pas exagéré, surtout qu’elle a échoué à anticiper l’impossibilité ou la difficulté de boycotter l’élection dans le contexte actuel. Et il faut l’avouer, après trois années d’absence sur terrain, c’est facile pour l’opposition de perdre contact avec la réalité du terrain. Au cas contraire, elle aurait changé de stratégie.
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