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Le Burundi et son Histoire, en mode repeat

« Un peuple qui oublie son passé se condamne à le revivre », disait Winston Churchill, une citation qui correspond parfaitement à nous autres Burundais. La Commission Vérité Réconciliation a du pain sur la planche.

L’assertion de l’éminent historien Burkinabè Joseph Ki Zerbo est plus qu’une vérité d’Évangile: « Nul n’a le droit d’effacer une page de l’histoire d’un peuple car un peuple sans Histoire est un monde sans âme. »  Cette phrase-leitmotiv d’Archives d’Afrique (une émission de la Radio France Internationale) montre à elle seule le caractère sacro-saint dont revêt l’Histoire d’un peuple. Même à un iota, pas touche!

Cependant, force est de constater que tout cela reste un idéal. Ce n’est pas toujours parce qu’une chose est sacrée qu’elle n’est pas violée. Animés par un excès de zèle identitaire ou tout simplement à la quête du profit, certains n’hésitent pas à flirter avec le haram et nous pondre des versions tant ubuesques que cyniques de l’Histoire.

L’ignorance de sa propre Histoire, le grand mal d’un peuple

Notre cher Burundi, en matière de crises identitaires, en a vu de toutes les couleurs. Le grand mal est que les séquelles de cette Histoire restent coincées dans des bunkers de clichés et moultes idées reçues, ingrédients qui ne sont pas honnis par les politiques qui en concoctent un plat dont ils raffolent, l’instrumentalisation, comme le souligne le professeur Julien Nimubona, politologue.

«Partout ça se passe de la sorte. Les pouvoirs cherchent toujours à imposer une façon de voir la société en masquant ce qui lui est défavorable et brandir ce qui l’avantage. Quand par malheur ceux qui reçoivent ce message ne sont pas suffisamment instruits sur le passé, ils deviennent une proie facile pour ceux qui voudraient instrumentaliser l’Histoire pour arriver à leurs fins», explique ce spécialiste des sciences politique.

Le Burundi et son Histoire, une relation compliquée

Il n’y a pas trop longtemps, une vidéo d’enfants scandant les dates sombres de notre passé a fait un tollé sur les réseaux sociaux. Leurs propos ont provoqué l’ire, non sans raison, de ceux qui trouvent que les politiques instrumentalisent l’histoire pour des fins qu’ils escomptent en stratèges. Et ces bambins doivent être la partie visible d’un immense iceberg.

Je ne peux qu’épouser la vision du professeur Nimubona pour qui «le discours politique peut se servir de l’Histoire pour cacher les responsabilités des uns et des autres pour in fine jeter l’anathème sur un groupe pour déboucher sur un conflit de mémoire entre différentes composantes d’une société.»

Le tort n’est pas à jeter aux seuls politiques. Même le monde «intellectuel» a du mal à s’accorder sur ce qu’il faudrait retenir de l’Histoire, les écrits y relatifs étant souvent redigés à travers un prisme identitaire. Il suffirait de lire d’une part Diomède Rutamucero et d’autre part Herménégilde Niyonzima pour comprendre que nous ne sommes pas sortis de l’ornière.

Pour ne pas être de ces peuples qui sont condamnés à revivre leur passé parce qu’ils l’oublient et surtout pour ne pas être des pions faciles qu’un machiavélique déplacerait à son aise sur son échiquier, un petit intérêt à notre Histoire assortie d’un certain esprit critique face à certains discours ne pourrait que nous faire du bien, je trouve.

 


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