Dépitée de voir son pays souffrir, la blogueuse Monia Bella Inakanyambo a tenu à lui écrire une missive, des paroles profondes pour exprimer son désarroi.
Cher Burundi,
Ça va faire un bon bout de temps maintenant que je cherche comment te le dire sans trop te froisser. Mais j’ai bien peur qu’il n’y ait pas de manière douce pour te l’annoncer. La nouvelle est violente, rude, sèche, à l’image des circonstances. « Petit pays », comme dirait Gaël Faye, tes enfants perdent un peu plus de leur humanité.
Ils deviennent sauvages et d’aucuns diraient que tu deviens une forêt, où l’on perd facilement ses repères. Vaste, sombre, bruissant de milles terreurs. Tes enfants sont dorénavant sur la défensive, aux aguets. Ils ne peuvent plus oser vivre, ils se contentent de survivre. Ils sont longtemps restés sur leurs gardes que même leurs rêves se sont retrouvés diminués.
Cher Burundi,
Aujourd’hui tu as une couleur. Rouge. Non pas le rouge de ton drapeau, encore moins celui de l’amour. Tu es d’un rouge, celui du sang. Du sang des nôtres, des tiens, de ce sang qui a coulé sous nos regards confondus. Cassant nos voix et brisant à jamais leurs échos. Emportant avec lui nos âmes perplexes et tristes face à la mort. Tu as la couleur des yeux de la veuve, de l’orphelin, du perdu.
La mort ? Elle n’est plus mystère, elle est burundaise. Elle t’a envahie, tu t’es laissé faire, et tu l’as apprivoisée. Elle est devenue familière. Elle est tes valeurs et tes coutumes. Tes habitudes. Cette marque qui fait de toi l’intrus, dorénavant, parmi les autres nations.
Cher Burundi,
Tes enfants perdent leurs vies. Un à un, dans le calme et le silence. Dans la surprise et l’amertume. Dans la peur et la résignation. Dans la révolte et le mépris. La pauvreté et l’impuissance. Dans l’incompréhension. Et puis dans leurs camps de réfugiés. Oui, loin là-bas, sur ces terres autres que leur terre-mère. Sur ces terres qui les ont conduits à leurs dernières heures.
Trente-sept autres vies ont subitement cessé. Une quarantaine ? J’en ai assez de compter. D’essayer de combler une vie qui se vide avec un chiffre. De tenter de mettre un nombre là où fut la vie. Je ne vais plus me hasarder à rassembler deux morceaux d’un cœur fragmenté par la perte d’un être cher. Je ne saurais comment on s’y prend. Alors je t’en laisse le soin, telle la mère que tu es.
Cher Burundi,
Face aux rapports accablants, horribles, vrais, certains préfèrent encore un compliment menteur à une critique sévère. Sous d’autres cieux, le monde crierait au scandale. À la vie. À l’existence. La vie cesserait, le pays s’immobiliserait. Le monde s’arrêterait de tourner. Tes enfants pleureraient en chœur. Ils déploreraient ces vies consumées lâchement. Ils regretteraient ces tortures, dénonceraient ces viols. Ils s’indigneraient, ensemble, et le monde compatirait.
Malheureusement, je retiendrai simplement cette fois, que le monde n’a pas été #Burundi ni #Kamanyola comme il a été #Barcelone, #Nice, #Garissa ou encore #Paris. Mais sachant que toutes les vies se valent, tu es clairement devenue une énigme.
Mais Cher Burundi,
Certains diront que tu es brisé. Moi je doute de tout, jamais de toi. Je garde espoir, ceci n’est qu’un mauvais rêve. Demain je me réveillerai et je te verrai comme je t’ai rêvé, pays de lait et de miel, de paix et d’espoir.
La plume est belle, profonde, penetrante. Elle heurte et caresse en même temps. Elle véhicule un sentiment certes controversé mais qui n’a rien à voir avec la haine et la résignation.
excellent poeme ! si ca parvient aux âmes blessés on aura un changement si parvient aux coupables demeureront un injure ! oh pauvre diable ! la crainte de mourrir est un sentiment jugé herité de nos enceintres ! quel l’importance de vivre quand on rien ! la vie n’est pas juste pour les barundais! nouvelle érè qui se construit .
Une belle plume.Merci chere blogueuse! Et au fond, vous n’avez pas tort
Waouh! Un beau message. Je kiffe. J’aurai aimé que tu fait de ce texte un poème ou un slam car je vois que c’est un texte plein d’inspiration et un bon texte d’un aspect attrayant.