Jeudi 22 décembre. Le palais des Congrès de Kigobe abrite une session unique. A l’ordre du jour : l’analyse de la loi de finances portant sur le budget de 2017. Le journaliste-blogueur Egide Nikiza était présent et nous fait part de ses impressions. Reportage
L’hémicycle est plein à craquer. A l’arrière des députés, des cadres du ministère des Finances et de nombreux journalistes suivent la discussion parlementaire.
Je suis aussi dans la salle, noyé parmi les centaines d’individus qui suivent le débat. À mes yeux, seuls les économistes et juristes se retrouvent facilement. Les élus du peuple échangent des chiffres très alambiqués et semblent parfois perdus.
Budget contre le peuple
La loi de Finances portant fixation du budget (exercice 2017) est attaquable sur plusieurs aspects. Apparemment, l’Etat compte vivre des recettes intérieures à hauteur de plus 70%. De nombreuses nouvelles impositions semblent par ailleurs prévues.
Du carburant aux permis de conduire en passant par le sucre, les boissons, les clous, les tissus, etc., l’Etat est manifestement résolu à combler le gel des aides extérieures par trop de taxes. Pire, ces dernières n’épargnent même pas les produits de première nécessité.
Étonnamment, le ministre des Finances semble relativiser : « Ce budget d’austérité ne concerne pas directement la population. C’est l’Etat qui doit serrer les ceintures».
Néanmoins, les choses ne sont pas si simples qu’elles ne le paraissent. Le budget enregistre un déficit global de 174,1 milliards BIF. Le crédit réservé au ministère de l’Agriculture est revu à la baisse. Il passe à 142,6 milliards BIF contre 159,2 l’année dernière.
Cela, c’est sans parler du gel de tous les recrutements dans la fonction publique. Pourtant, d’aucuns savent que l’Etat est le grand employeur au Burundi. Le secteur privé se cherche toujours.
Cette prévision budgétaire hypothèque incontestablement l’avenir des jeunes burundais.
Des reformes mort-nées
L’allocation destinée au Fonds Commun de l’éducation est horriblement réduite. De plus de 12 milliards en 2016, sa portion budgétaire est de 4,6 milliards BIF seulement.
Les élus du peuple ont déconsidéré les conseils du président de la Cour des comptes. Ils l’avaient pourtant accueilli la veille en vue de recueillir ses observations. J’avais eu le privilège d’y être également. Sans ambages, l’hôte de l’Assemblée nationale avait tiré la sonnette d’alarme : « Notre rôle est d’éclairer vos lanternes afin que vous autorisiez l’exécution de ce budget en connaissance de cause ».
Maintenant que l’allocation destinée au secteur éducatif est sensiblement diminuée, je me demande par quels moyens le gouvernement pourra s’acquitter de ses devoirs vis-à-vis des jeunes. D’où il tirera des financements pour les myriades de reformes qu’il a entreprises ces derniers jours ?
Quid de l’équipement de centres des métiers qui ne sont qu’à leurs balbutiements ? A ce sujet, il est important de souligner que ce genre d’enseignements nécessite du matériel didactique.
Palais présidentiel controversé
Je suis toujours estomaqué. Le gouvernement affecte une bagatelle de 18 milliards BIF à la construction du Palais présidentiel. Cependant, le chargé d’affaires à l’ambassade de Chine annonçait, deux jours plus tôt, la fin des travaux dans une année. C’était à l’occasion de l’inauguration, en grande pompe, par le chef d’Etat, de la télédiffusion numérique.
Aucun député ne daigne lever son petit doigt pour tirer au clair cette affectation, me semble-t-il, brumeuse. Pourtant, je sais que leur mission va au-delà de légiférer. L’article 158 de la Constitution, leur accorde la prérogative de contrôler l’action gouvernementale. Ce n’est même pas un droit. C’est un devoir.
Personnellement, je pense que la présidence de la République, tout comme l’ambassade de Chine, devraient éclairer l’opinion à ce sujet. Quel est l’apport du gouvernement dans la réalisation du projet de construction du Palais présidentiel ?
Quand bien même la loi de finances portant fixation du budget exercice 2017 n’est pas de bon augure, elle me permet de découvrir à quel degré les autorités burundaises sont « jalouses » de la souveraineté nationale. Elles ont prévu une provision budgétaire importante dans la perspective des élections de 2020, pendant que la paupérisation se profile à l’horizon.
Quand une députée lève les deux bras, sa voix compte double ?
Quand il lève ses deux bras, cela signifie qu’il a une procuration… Il vote non seulement pour lui mais aussi pour un autre député qui lui a donné le droit de voter en son nom
Mujeri la plus faible politicien