Certaines scènes ravivent de mauvais souvenirs et présagent un avenir peu glorieux. Le blogueur Landry Gakuba regarde se dérouler la crise politique au Burundi avec désolation. Il craint que les victimes actuelles deviennent les bourreaux de demain. La répétition d’un ancien scénario.
Depuis le début des troubles que traverse notre pays, j’ai vu pas mal d’images, vécu beaucoup de scènes. Certaines m’ont marquées plus que d’autres. Mais parmi toutes, une restera. Elle me hante.
Aucune larme. Un regard noir.
Un jeune homme, la trentaine, débout devant la morgue de l’un des hôpitaux de Bujumbura, tard dans la nuit. Son père vient d’être assassiné par des hommes en ténue policière. Ils lui ont tiré dessus alors qu’il était assis devant son domicile.
Aucune larme. Un regard noir. Je m’approche sans savoir par où commencer pour lui présenter mes condoléances. Au creux de sa main, une chemise tachée de sang que portait son père. À côté de lui, les voisins qui l’ont aidé à amener le cadavre, terrorisés et ayant sombré dans un silence de mort.
Un passé qui ne passe pas
Cette image me rappelle certains témoignages d’anciens chefs rebelles dont les actes ont illustré notre pays, parmi lesquels le chef de l’État.
Le scénario commun est le suivant. Un fils voit son père tué ou emmené par des hommes en uniforme pour finir par ne plus jamais le revoir. Le fils décide de prendre les armes pour venger son père.
Épargnons notre génération des affres de la guerre.
Les Burundais s’en souviennent. Pas besoin de remuer le couteau dans la plaie.
À l’heure qu’il est, de nombreux fils sont devenus et deviennent encore orphelins. Comme les autres, ils seront assoiffés de vengeance et non de justice. Le cercle vicieux. Pathétique.
Il est pourtant possible de mettre un terme à cet enchaînement. On peut éviter à notre nation une autre année 1972, 1988 ou 1993. Assez ! Le Burundi a bien mieux à offrir. Épargnons nos familles, notre génération, des affres de la guerre. Apprenons de l’histoire, surtout qu’elle est récente. Exemptons nos prochains du malheur que nous avons vécu.