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L’entêtement suicidaire de Nkurunziza

Il ne s’y attendait peut-être pas, car il a été surpris par la réaction du peuple burundais qui s’est exprimé à haute voix sans peur ni honte pendant plus de deux semaines contre la violation de sa constitution arrachée par les larmes, les souffrances et les morts à l’issue de négociations politiques entre les différentes forces protagonistes tenues pendant de longs mois en 2004, dans la ville historique d’Arusha, en Tanzanie.

Pierre Nkurunziza n’est pas encore au bout de sa surprise et de son étonnement, lui qui a continué à croire que le pouvoir est toujours au bout des armes de ses miliciens dénommés les « Imbonerakure ».

Aveuglé, enivré par le pouvoir et sourd aux signes du temps et l’évolution du contexte politique international, Pierre Nkurunziza a raté l’occasion d’inscrire son nom dans le Panthéon de l’histoire de ce pays qui compte le plus grand nombre de dirigeants assassinés ou chassés du pouvoir par les armes.

Pierre Nkurunziza n’a pas voulu entrer dans l’histoire.

Pierre Nkurunziza n’a pas pris en compte la comptabilité macabre des victimes de ces longues guerres civiles qui ont endeuillé tant son pays. Cet homme qui a rejoint la rébellion hutu en 1999 devrait songer au nombre de morts, de destructions méchantes, de déplacements forcés des populations burundaises tant à l’intérieur que vers les trois États voisins, notamment la RDC, le Rwanda et la Tanzanie, où ils ont vécu dans des camps pour réfugiés pendant plus de vingt ans.

Pierre Nkurunziza n’a pas voulu entrer dans l’histoire comme celui qui aurait été le tout premier chef d’État burundais à avoir appliqué les accords politiques signés à Arusha qui ont installé la paix, la sécurité et surtout la cohabitation pacifique entre les deux communautés parlant la même langue, ayant vécu ensemble pendant des siècles, partageant les mêmes coutumes et traditions et condamnées à vivre ensemble ad vitam aeternam.

Et après ?

« Devant l’ouragan de l’Histoire, un fruit mûr ou pas mûr finit par tomber. »

Pierre Nkurunziza n’a pas voulu comprendre qu’après la présidence de la République, il y a toute une vie. Il lui aurait suffi de relire la riche histoire de certains États africains pour se rendre compte que de dignes fils de ce continent ont goûté aussi et avant lui aux délices du pouvoir suprême mais ont résolu de se conformer au sacro-saint principe de l’alternance du pouvoir : Mathieu Kérékou, Abdou Diouf, Ketumile Masire, Jerry Rawlings, Nicéphore Soglo, Kenneth Kaunda et tous ses successeurs jusqu’à l’actuel chef d’État zambien, Joachim Chissano, Léopold Sédar Senghor, Sam Mujoma, Thabo Mbeki, les deux successeurs de Jomo Kenyatta, Goodluck Jonathan, Olusegun Obasandjo, etc.

Ceux-ci n’ont pas voulu effectuer un passage en force alors qu’ils en avaient aussi les moyens. Des moyens certes efficaces, mais qui ne résistent pas à l’ouragan de l’histoire. Et comme le disait l’un des dictateurs qui a commis les mêmes erreurs que lui, à savoir feu le maréchal Mobutu : « Devant l’ouragan de l’Histoire, un fruit mûr ou pas mûr finit par tomber. »

Croyant que cela n’arrive qu’aux autres, Pierre Nkurunziza a vite oublié les journées glorieuses de Ouagadougou qui ont mis fin à un régime ayant régné sans partage au Burkina Faso pendant 27 ans. À qui le tour ?

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