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L’Apocalypse selon Saint WhatsApp

Le 16 avril dernier, nous étions à la veille de la marche-manifestation organisée dans la capitale par les Burundais opposés au troisième mandat du président Pierre Nkurunziza. Pour le groupe de presse Iwacu, Léandre Sikuyavuga a alors écrit un édito dans lequel il décrit les rumeurs du jour.

Bujumbura a peur. Presque tout le monde est parano. Des informations, amplifiées par les réseaux sociaux, les unes plus catastrophistes que les autres, circulent. Des « infos » parlent d’une descente sur la capitale des plus zélés parmi les jeunes Imbonerakure, le fer de lance du parti au pouvoir. Des indiscrétions sur leurs « intentions ou opérations » fusent de partout.

Les victimes désignées de ces Imbonerakure des collines sont les frondeurs et d’autres acteurs politiques et de la société civile, opposés au troisième mandat du président Nkurunziza.

Du côté des partis d’opposition, des scenarii et des hypothèses sont échafaudés. « Le CNDD-FDD vient d’envoyer des camions dans chaque commune pour ramener des Imbonerakure et des anciens combattants à Bujumbura. »

La proclamation ?

L’hypothèse s’affine : un congrès sera organisé simultanément avec la manifestation. Et, à l’issue de cette grand-messe, le président Nkurunziza sera proclamé candidat pour un troisième mandat.

Les Imbonerakure et les anciens combattants resteront à Bujumbura. Si l’opposition et la société civile osent descendre dans la rue, ils vont s’opposer. « Et là tout peut arriver, la confrontation va déboucher sur une paralysie générale des activités. Et la suite, c’est le chaos… »

Et les bruits de couloir…

Parallèlement, les réseaux sociaux, plus particulièrement WhatsApp, Facebook, Twitter et Viber s’emballent et enveniment une situation déjà tendue. Entre autres messages : « Rentrez tôt ! Faites vos provisions, on ne sait jamais ! La ville est quadrillée ! Les Imbonerakure sont à chaque coin de la rue… Restez éveillés ! »

À 22 heures, les cabarets normalement animés à cette heure sont vides.

Des photos montrant un déploiement de ces jeunes du parti au pouvoir qui campent sur le terrain communément appelé « Tempête » circulent à la vitesse de l’éclair.

Souvent envoyés par des amis de confiance, ces messages ou ces consignes sont respectés, observés. « Il faut prendre ses précautions. Bref, c’est un vendredi de toutes les peurs. »

Iwacu fera un petit tour de la ville. À 22 heures, les cabarets normalement animés à cette heure sont vides, en ville la circulation est fluide. Les DJ des boîtes de nuit ont du mal à créer l’ambiance. Les esprits des rares fêtards sont ailleurs. Entre-temps, les ménages ont commencé à constituer des stocks de vivres. On ne sait jamais…

Le lendemain, comme tout le monde le sait, l’apocalypse annoncée n’a pas eu lieu. Comme quoi, la machine à rumeurs fonctionne bien au Burundi.

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