Les Burundais commémoraient ce 13 octobre le 54e anniversaire de la mort du Prince Louis Rwagasore, le héros de l’indépendance. Une occasion pour le blogueur Landry Gakuba de revisiter l’histoire et interroger le présent afin de voir ce qui reste de son héritage.
Tête baissée, un cœur qui ne bat plus, un corps sans vie dans l’un des restos les prisés du bord du lac Tanganyika, c’est le Prince Louis Rwagasore qui vient d’être assassiné. La belle vue de la plage a sans doute été la dernière image qu’il a emportée.
Lettre au héros
Ce 13 octobre 1961 venait de s’éteindre celui qui sera reconnu, quelques temps après, comme le héros national de l’indépendance des Burundais. Bien qu’il savait que faire tête au tout puissant colon pouvait lui valoir la mort, il n’a pas hésité. Tout ça parce qu’il avait un idéal, une vision pour le Burundi.
Une vision qu’on retrouve dans le discours qu’il avait prononcé moins d’un mois avant son assassinat après la victoire de son parti, l’Uprona, aux élections législatives du 18 septembre 1961.
Cher prince,
J’ai réécouté ton discours et je peux avouer que je ne sais pas si je dois être fier de ce qu’on a fait de l’indépendance pour laquelle tu t’es sacrifié.
« Nous vous demandons de nous aider à entreprendre l’avenir avec confiance »
Certains passages résonnent toujours dans mes pensées : « …les hommes qui se permettront de décourager ou importuner les étrangers ou les adversaires politiques, sous prétexte de la victoire du parti nationaliste, seront considérés comme des ennemis de la patrie. Ils seront punis de manière exemplaire. Au peuple Belge, j’ai l’honneur d’adresser un message de gratitude, la responsabilité que vous, Belges, vous portiez, vous allez bientôt la transférer sur nos épaules et nous sommes conscients de nos devoirs. Nous vous demandons de nous aider à entreprendre l’avenir avec confiance, de continuer à nous aider avec générosité, à nous guider dans le respect de notre dignité, de nos intérêts et de notre propre conception de l’intérêt national. »
Je crois que le peuple Belge a répondu à ta demande : il continue à nous soutenir. Ce peuple était jusqu’à parmi les premiers soutiens financiers que nous comptions. Mais je ne sais si, en renvoyant l’ambassadeur belge et en manifestant devant leur ambassade, nous avons respecté ta mise en garde de « ne décourager ou importuner les étrangers ».
Tu disais aussi qu’il fallait surtout que les habitants du Burundi se sentent en paix, en sécurité. Ton gouvernement voulait que chaque habitant du Burundi ait confiance en sa protection.
À la recherche du « Burundi paisible »
54 ans après ta mort, je me questionne sur cet objectif. Je m’interroge d’autant plus que, pas plus tard qu’hier, sur une radio internationale, le premier vice-président de l’Assemblée nationale, Agathon Rwasa, partageait ses peurs affirmant qu’il faisait toujours parti des gens menacés. Cet ancien chef rebelle affirmait que bien qu’il ait fait le choix d’entrer dans les institutions, il se tromperait en disant que les membres de son parti sont plus sécurisés.
Mais, prince, peut-être que cela est dû au fait que tu n’as pas eu assez de ton temps pour que ton gouvernement puisse travailler et donner un exemple aux autres qui sont venus après !
Quand tu déclarais : « À cette heure de la victoire du Parti, fût-il le mien, je ne suis pas grisé par le succès, car pour moi et mes amis, la véritable victoire ne sera atteinte qu’après l’accomplissement d’une tâche difficile mais exaltante ; un Burundi paisible, heureux et prospère. »
Cher prince, pour un Burundi de 2015, ces mots sonnent comme une utopie !
Et aujourd’hui, je doute que si tu nous jugeais à nos actes, on aurait une quelconque satisfaction de ta part qui soit notre fierté !
Repose en paix cher prince.